mardi 7 avril 2020

Bad Moon ( 1996) de Eric Red



Alors qu'il sont en pleine expédition au Népal, Ted Harrison et sa petite amie Marjorie, vont être sauvagement attaqués par un loup-garou. Suite à cela Ted rentre, seul, aux Etats-Unis. La malédiction est sur lui, et les médecins ne peuvent rien faire pour le sauver. En désespoir de cause, Ted décide alors de renouer le contact avec sa sœur Janet, qui vit avec son fils, Brett, et son chien, Thor. Ted espère que l'amour de ses proches fera reculer sa « maladie »...

Bad Moon est un film qui a été maltraité à sa sortie par la critique. Il a fait un bide et c'est un peu injuste, tout de même. Son réalisateur, Eric Red, est surtout connu pour avoir été le scénariste du culte Hitcher (1986), de Near Dark ( 1987) et de Blue Steel ( 1990) aux cotés de Kathryn Bigelow. Pas mal donc. Certes, en terme de réalisation, la carrière du Eric est plus modeste, mais on peut dire que le scénariste/réalisateur américain s'en sort très bien sur Bad Moon. Sa mise en scène est tout à fait compétente, carrée, efficace. Rien à dire.

 
Outre la présence de Eric Red derrière la caméra, on retrouve aussi des noms connus dans le casting : Mariel Hemingway et Michael Paré. La première, avec sa bouille si reconnaissable, a quand même tourné dans une tonne de films, comme, par exemple, Manhattan de Woody Allen. Quant au Paré, je me souviens surtout de lui dans le magnifique Streets of Fire ( 1984) de Walter Hill, et dans The Philadelphia Experiment ( la même année!) aux côtés de Nancy Allen. Bref, il a eu la cote dans les 80's, le Michael Paré. Un peu moins, par la suite ! Ici, il nous livre une prestation un brin fadasse mais tout de même correcte.
Que peut-on réellement reprocher au film, en fin de compte ? Un scénario simpliste ? Oui, et alors ? Where is the problem, si le film a du charme et qu'il est fun ? Ce qu'il est intéressant de savoir c'est que le film est adapté d'un roman écrit par Wayne Smith, intitulé Thor. Donc, pour ceux qui ont suivi, le nom du chien de Janet, c'est à dire la sœur de Ted Harrison, le mec qui devient un loup-garou. Et ça a son importance. 

 
Car si le film prend apparemment beaucoup de liberté vis à vis du livre ( d'ailleurs on ne met pas en  avant sur l'affiche, hein, le fait que ce soit une adaptation) il n'en reste pas moins que l'idée principale du roman ( placer le berger allemand Thor au cœur de l'intrigue) confère à Bad Moon un profil de film de loup-garou très particulier. On s'attendait à ce que le personnage de Janet ( Mariel Hemingway) soit l'héroïne de l'histoire ( et effectivement c'est un personnage de femme forte, pleine de caractère) mais...non, c'est bien le chien le héros ici. Il est le premier à « griller » que quelque chose cloche avec l'oncle Ted. Et une grande partie du film sera basé sur ce duel entre un chien et un homme-loup. Original. Les esprits les plus critiques pourront critiquer en rebaptisant le film avec un titre du genre Superchien contre le Loup-Garou. Oui, ok. Mais pour ceux que ça ne dérange pas ( ce côté pas très vraisemblable, over the top) Bad Moon va se révéler être un film qui sort du lot. Et distrayant en plus.

Car Pleine Lune ( titre français paradoxalement assez mal choisi, compte tenu de l'histoire) comporte son lot de bonnes surprises. Après un départ sur les chapeaux de roue ( avec du sexe et du gore!) le film adopte plus un style qui rappelle l'époque Dark Disney (au début des années 80) ou celle d'Amblin ( on sourit quand on voit la scène où Brett s'échappe, à la nuit tombée, et saute de la fenêtre de sa chambre pour partir en mission, au guidon de son BMX. Si ça c'est pas du Amblin's style!). 

 
Une mise en scène efficace, une interprétation à la hauteur, un ton très premier degré (avec finalement assez peu d'humour pour désamorcer la tension) une photo magnifique ( bien servi par les décors naturels : lac, montagne, forêt) ; que dire de plus ? Que les FX sont très réussis ( enfin tant qu'on utilise pas de CGI. Nous étions dans les 90's et les effets numériques venaient de débarquer). La créature est magnifique et ses attaques tout à fait spectaculaires. Bravo au responsable des effets spéciaux. Seule une scène de transformation ( faite en numérique) est complètement ratée, à tel point qu'elle aurait dû être enlevée du film. Pas grave, passons outre. Tous les effets mécaniques sont formidables.Malgré tout, il faut bien avouer qu'on ne meurt pas de trouille dans Bad Moon, sauf si on a 5ans. Qu'importe le plaisir est ailleurs.

Les dresseurs du chien Primo ( Thor) sont également à féliciter. Il n'est vraiment pas facile de tourner avec des animaux. D'autant plus quand l'animal en question est de toutes les scènes ou presque. Un vrai tour de force.

En conclusion de tout cela, on peut dire que Bad Moon mériterait une seconde chance. D'une durée assez courte ( 1h19mn) le film est très plaisant à regarder. Il fait d'ailleurs un clin d'oeil assez appuyé ( et drôle) au Werewolf in London de 1935. Derrière les cadors du genre ( les Loup-garou de Londres, Hurlements and co...) Bad Moon est, au même titre, que Silver Bullett ( 1985), une sorte de underdog ( mwouhaha hoho ! je tenais à la placer celle-là!) tout à fait recommandable pour les grands amateurs de loup-garouteries. 



dimanche 29 mars 2020

Queen of Blood (1966) de Curtis Harrington

En l'an de grâce 1990, les hommes voyagent sans trop de problème dans l'espace (mwouhaha). C'est alors que des extraterrestres entrent en contact, via radio transmission, avec la Terre. Le message est clair : ils arrivent. Mais alors que ces derniers sont en route pour enfin rendre visite aux humains, leur vaisseau se crashe sur Mars. Aussitôt sur Terre on s'organise pour leur porter secours. L'équipe de sauvetage, une fois sur place, ne découvre qu'une seule survivante : une alien ( certes à l'apparence humaine) mais à la peau verte. Et ils vont s'empresser de l'embarquer à bord de leur vaisseau...

Bien que non crédité au générique, le producteur et roi du bis Roger Corman participe activement au projet Queen of Blood. C'est lui qui engage Curtis Harrington comme réalisateur, après avoir été impressionné par le travail de ce dernier sur le magnifique Night Tide. N'arrivant pas à financer des projets plus personnels, Harrington accepte la proposition de Corman qui consiste à tourner ( quasiment en même temps!) deux films ayant pour tête d'affiche la star anglaise Basil Rathbone : Queen of blood et Voyage to the prehistoric planet.

 
Avec un budget riquiqui ( à la Corman quoi) mais un grand sens de la débrouille, Harrington va réutiliser les scènes « à effets spéciaux » ( des scènes de navigation spatiale quoi) de deux films de SF russes. Pour le reste, des décors minimalistes feront bien l'affaire.
Décors en carton pâte, accessoires en plastoc, FX cheapos, maquettes en guise de vaisseaux, Queen of Blood est l'archétype même du film de SF pop ( fans hardcore de hard sf, fuyez!) ambiance 60's. Et ça a un indéniable charme. Surtout que la musique est au diapason (ho ho) avec des passages au thérémine ! Et cette affiche, mon dieu, cette affiche ! Corman savait vendre du rêve !

 
Il faut également souligner que Queen of Blood bénéficie d'un casting qui a de la gueule. En tête d'affiche, nous retrouvons donc Basil Rathbone ( pour les plus jeunes, signalons que Rathbone était une grande star du cinéma britannique dans les années 30 et 40) c'est à dire Mister Sherlock Holmes ( qu'il incarna 14 fois à l'écran!). Pas mal du tout, même si la carrière de Basil Rathbone était en phase descendante en 1966 ( d'ailleurs il est décédé un an après.). Nul doute que Corman a dû finement négocier le cachet de la star en déclin. En tout cas l'acteur anglais semble ici un minimum prendre son rôle au sérieux ( même si apparemment il lui arrivait d'oublier son texte!). Il incarne parfaitement un scientifique enthousiaste, chef de mission qui va de l'avant. De manière général, tous les acteurs ont l'air d'y croire. Le ton du film est très premier degré. Et c'est magnifique !
Outre Basil Rathbone, nous retrouvons John Saxon, dans le rôle du héros astronaute américain, beau et intrépide. Un sacré baroudeur qui tourna des films par palettes. Citons par exemple Opération Dragon ( avec Bruce Lee), Black Christmas ( de Bob Clark) et bien entendu Nightmare on Elm Street où il joue le rôle du père de Nancy. Bref, cet homme là a tout fait dans le domaine de la série B et de la série TV : du cinéma bis italien, de l'horreur, des films de kung-fu etc..etc...Une légende quoi !

 
Un autre acteur perçait petit à petit à cette époque : Dennis Hopper. Dans un registre plus rêveur, plus fragile, que celui de John Saxon. L'acteur s'était justement illustré dans Night Tide, et Curtis Harrington a visiblement eu envie de retravailler avec lui. Pour finir, n'oublions pas de citer l'actrice Florence Marly ( qui incarne la reine Alien, et qui, comme son nom ne l'indique pas du tout est d'origine tchèque). Corman la trouvait trop vieille et voulait donc une actrice plus jeune ( une bimbo quoi!) mais Curtis Harrington a insisté pour qu'elle aie le rôle. Et il a eu mille fois raison. Avec l'aide d'un maquillage tout simple, Marly réussit vraiment à être troublante. Son regard, son expression, sa gestuelle, laissent vraiment transparaître le sentiment de convoitise gourmande qu'elle éprouve à la vue des humains. On comprend tout de suite sa dangerosité tout en ne niant pas le pouvoir de fascination du personnage.
  
La patte Corman est aussi évidente en terme de rythme et de durée du film. Ça va droit au but, ça va vite. On est pas là pour jouer les contemplatifs ! Le film, conscient de ses limites, a la sagesse de ne pas trop durer ( 1h18, mes aïeux!). Usant de bonnes grosses ellipses pour masquer ses limites budgétaires, Queen of Blood se révèle un bon petit film de horreur/sf bourré de charme et divertissant. D'ailleurs ce côté horreur/sf fera dire à Curtis Harrington que Ridley Scott se serait bien inspiré de Queen of Blood pour réaliser Alien. D'un autre côté, on peut dire que le personnage que joue Florence Marly, avec son côté vampire végétal et son mode de reproduction, est peut être inspiré de L'Invasion des Profanateurs de Sépultures. J'y ai vu un lien. Mais c'est moi, hein ! En tout cas Curtis Harrington fait partie de ces réalisateurs dont on ne parle pas forcément beaucoup mais qui franchement avait un style, un univers, très intéressants. Parmi ses films, outre Queen of Blood bien sûr, il faut voir Night Tide, Games ( avec Simone Signoret!) et Killing Kind notamment. Bref, un drôle de cas de réalisateur. Mais un bon ! 

 


vendredi 20 mars 2020

Long Weekend ( 1978) de Colin Eggleston


Un jeune couple de citadins australiens décident de partir en week-end dans un coin perdu au bord de la mer. Leur relation est au plus mal et ils espèrent que cette escapade de camping sauvage et de communion avec la nature va remettre leur couple sur de bons rails. Hélas, sur le lieu où ils décident de s'installer, les choses prennent une drôle de tournure pour eux. La nature n'est pas très accueillante...
Ça n'a l'air de rien comme ça mais une bonne petite intro musicale contribue beaucoup à mettre le spectateur dans de bonnes dispositions, vis à vis d'un film qu'il est sur le point de découvrir. Félicitations donc au compositeur de Long Weekend, un certain Michael Carlos, qui nous gratifie, dès le générique, d'un très joli thème musical. Et pendant ce même générique, le spectateur attentif apprend avec grand plaisir que le scénariste du film n'est autre que Everett de Roche. À partir de là, on est déjà diablement rassuré et partant. C'est que le bonhomme en question a écrit les scénarios de quelques uns des meilleurs films de la Ozploitation ( terme désignant le cinéma de genre australien à petit budget. Essentiellement des films d'horreur et d'action quoi) tels que Harlequin ( 1980), Razorback ( 1984) de Russell Mulcahy, Patrick (1978) et Déviation Mortelle ( 1981) de Richard Franklin. Bref, c'est un bon, le Everett. Un mec qui a des choses à dire dans ses histoires.

 
Côté réalisation, nous retrouvons derrière la caméra un certain Colin Eggleston. Certes le monsieur n'est pas très connu ( il a surtout fait des téléfilms et de la série TV) mais ici, avec un bon scénario en main, il fait très bien le job. D'ailleurs Long Weekend est probablement son film le plus connu et le meilleur. Ce qui lui valut d'être primé au festival d'Avoriaz en 1979, aux côtés de L' Invasion des Profanateurs de Sépultures, de Philip Kaufman. Tout de même !

Donc, penchons-nous sur ce que raconte Long Weekend.
Peter et Marcia sont donc un couple en crise. Lui ( interprété par un John Hargreaves beau et antipathique comme il se doit) est un homme infidèle et difficile à cerner. On le voit quitter sa maîtresse et, lorsqu'il rentre chez lui, tester le viseur de son fusil de chasse sur...sa femme, Marcia ( incarnée par Bryoni Behets, jolie et nunuche comme il se doit). Ce Peter est un chasseur. C'est pas cool. Et pourtant, lorsque en cours de route il écrase un kangourou, on sent que cela lui pèse sur la conscience. Même s'il ne veut pas trop le montrer.

 
Ainsi donc ces deux là veulent être dans la nature. Mais immédiatement, ils ont l'air d'intrus. À peine arrivés, ils salissent tout, détruisent tout. Tu le sens là, le message écologico-misanthrope du film ? Cette zone sauvage d'Australie où ils établissent leur camp a des allures flippantes, de par son côté labyrinthique et inexploré. Les cris d'animaux qui résonnent dans la nuit noire ressemblent à des hurlements fantomatiques, à des grognements de monstres. Marcia, ouvertement inadaptée au milieu naturel, ne cache pas ses envies de faire demi-tour. Mais Peter insiste. Il aime ça, être ici. Même s'il ne respecte absolument pas la nature. Et c'est là qu'on se dit : «  ah, non, en fait, pas de doute : c'est bien un salaud ! ».
Par de longs passages très immersifs, le film nous plonge dans l'angoisse puis la terreur. Toute cette vie qui fourmille autour d'eux, tout cela terrifie les deux personnages. Ils découvriront à leurs dépens que la nature est un lieu bien inhospitalier pour l'homme moderne. Lieu de perdition, lieu de cauchemar, d'un glauque qui flirte avec le surnaturel.

 
Tout ce qui va tourmenter les deux personnages est constitué à la fois d'éléments qui ont l'air d'être des tours joués à leur imagination ( quoi de plus efficace pour faire peur?) et de choses réellement tangibles et explicables ( donc particulièrement malaisantes).
Par petites touches, savamment dosées, le comportement des animaux aux alentours laisse perplexe et inquiète. L'ombre des Oiseaux de Hitchcock plane tout près.
Quelque chose provenant de la nature, un cri de souffrance, fait écho à celle des personnages. Ici point de gentils contre les méchants. Juste deux spécimens d'une espèce déracinée ( et donc médiocre) qui se font clairement rejetés par le milieu naturel. Parce qu'ils font tâche. Et tout le drame, tout le mal, ici présents est bien l'œuvre d'une main humaine. Encore et toujours.
La misanthropie du film éclate au moment de vérité du film. Peter et Marcia se lancent des « je t'aime » mais quand la situation dégénère véritablement, quand la panique arrive au galop, alors c'est sauve qui peut. Que sont-ils donc venus faire ici, ces deux là ? À part laisser une traînée de peurs, d'ordures et de choses mortes ? Long Weekend est plus qu'un film d'attaque animale, plus qu'un survival. C'est une œuvre troublante, belle, flippante. Avec un message.


jeudi 12 mars 2020

Don't Go In The House ( 1979) de Joseph Ellison

Donald Kohler a subi, durant son enfance, bien des traumatismes. Sa mère, une sorte de fanatique religieuse, lui brûlait les avant-bras avec la flamme de la gazinière pour le punir de son « impureté ». Quant à son père, il est juste « parti » on ne sait où. Et même si maintenant Donald ( ou Donny pour les intimes) est un adulte, on sent tout de même qu'il a toujours un gros problème avec le feu. ( Malgré cela il travaille quand même à l'incinération des ordures !). Un jour, Donnie assiste, médusé et fasciné, à un terrible accident au cours duquel un de ses collègues de boulot est transformé en torche humaine. Pour couronner le tout, il rentre chez lui et découvre sa mère morte. Donny perd immédiatement le peu de raison qu'il lui restait. Il se met à entendre des voix qui lui murmurent avec insistance de se venger des femmes... par les flammes.
Le premier plan qui nous fait découvrir la maison des Kohler en dit long : un plan incliné pour nous montrer qu'ici tout va de travers. Les escaliers ont l'air énormes et c'est tout le premier étage qui semble écraser le pauvre Donny sous son poids. Normal la chambre de la mère est en haut. Ce pauvre Donny est un gamin apeuré, coincé dans un corps d'homme. C'est un fils dévoué, pour ne pas dire servile. Et pourtant cette mère est une peau de vache tyrannique. Une folle. Elle le rabaisse constamment, l'humilie et surtout le maltraite. De ce fait, très vite, le normanbatisme du personnage de Donny saute aux yeux.


Au cours d'une scène qui est une totale repompe du Psychose de Hitchcock ( la mère assise dans son fauteuil, en tournant le dos à la caméra. On a déjà vu ça quelque part, hein) Donny pète donc une durite en réalisant que sa mère n'est plus. Il est terriblement effrayé par ce brutal accès à la liberté. Heureusement il n'est pas complètement seul. Il y a des voix qui lui parlent, qui le rassurent et qui lui disent quoi faire.

Donny se lance donc dans sa quête de vengeance. Une à une, il attire des jeunes femmes dans la grande maison familiale ( demeure qui a plutôt de la gueule mais dont certaines parties sont clairement délabrées, comme l'esprit du bonhomme) qui elle aussi fait beaucoup penser à la maison de la mère Bates. Tout comme la mère Kohler faisait probablement payer à son fils les fautes commises par son mari, Donny va se venger de sa mère en s'attaquant à d'autres femmes. Le fait que ces dernières ne s'intéressent que très peu à lui n'arrange rien à la situation non plus ( mais bon, il faut dire que le garçon est bien terne aussi).

L'omniprésence du feu dans la vie ( l'incinérateur, le lance-flammes, les allumettes, les bougies...) et dans les cauchemars de Donny est l'essence même de sa malédiction. Donny a vécu toute sa vie dans le dégoût de soi, dans la culpabilité et dans la douleur. C'est à la base une victime innocente, ce gamin. Il va essayer de revenir dans le droit chemin. Mais la colère, le sentiment d'être rejeté et trahi, tout cela va le transformer en monstre.

Il est intéressant de voir que la partie finale du film fait penser clairement à Maniac. Or, ce dernier est sorti un an plus tard. William Lustig aurait-il vu Don't Go in the House ( aussi intitulé Pyromaniac, en France) et s'en serait-il inspiré dans le dernier acte de Maniac ? En tout cas Don't Go in the House est sans conteste un film bien réalisé, sans temps mort, et bénéficiant de bonnes prestations d'acteurs. L'acteur qui interprète le rôle principal ( un certain Dan Grimaldi, qui, pour moi est un illustre inconnu. Mais qui a joué dans la série TV Les Sopranos apparemment) s'en sort très bien pour le tout premier rôle de sa carrière. 


Quant au réalisateur, Joseph Ellison, on peut dire qu'il a un parcours assez atypique. Musicien à la base, il a une filmographie peu fournie ( deux films seulement). Ce qui fait penser que la musique comptait plus pour lui que le cinéma. Dommage parce que sa réalisation est franchement de qualité. D'autant plus que Ellison participait à l'écriture de ses scénarios. Son goût pour la musique est en tout cas palpable dans Don't Go in the House. La musique disco, en l'occurrence. Cette ambiance disco ( très ancrée dans l'époque fin des 70's) créé un drôle de contraste avec cette plongée dans la folie d'un homme. Mais pourquoi pas.
Et cette virée glauque se termine étrangement à la lisière du fantastique ( ou dedans, en fonction de l'interprétation de chacun). Conclusion étonnante, vraiment. Avec cette idée de cercle infernal du mal qui se transmet des parents aux enfants. C'est que le film a un message. Les adultes fous et violents brutalisent les innocentes victimes que sont les enfants et ces derniers ne grandissent que pour perpétrer le mal à leur tour...



dimanche 3 novembre 2019

Daughters of Darkness ( 1971) de Harry Kumel

Tout juste sortis de l'église, un couple de jeunes mariés, en provenance de Suisse, voyage vers l'Angleterre afin que la jeune femme puisse être présentée à sa future belle-mère. Mais, par la force des choses, ils vont être obligés de faire escale au Grand Hôtel des Thermes de Ostende, en Belgique. C'est là qu'ils vont faire la connaissance de la très mystérieuse et fascinante Comtesse Bathory, accompagnée de sa secrétaire Ilona...

Daughters of Darkness ( ou Les Lèvres Rouges, titre français) est une coproduction franco-belgo-germanique réalisée en 1971 par Harry Kumel. Ce film est, avec Malpertuis ( une adaptation du roman de Jean Ray avec Orson Welles ) les deux grands faits d'armes du réalisateur belge. On peut dire que sur cette courte période Harry Kumel était particulièrement inspiré par le fantastique classieux. En effet, le reste de sa carrière semble plus modeste et moins tourné vers le genre qui nous intéresse.



Une des premières choses que j'ai à dire sur Les Lèvres Rouges est que c'est un film sur lequel j'ai longtemps fantasmé, étant donné qu'il était assez difficile de se le procurer. Dans ce cas là il arrive que l'on soit déçu quand, après tant d'attente, on finit par enfin pouvoir voir le film. Fort heureusement, ici ça n'est pas le cas.

La première chose marquante dans ce film arrive tout de suite : la musique. Le compositeur François de Roubaix a écrit un thème d'intro qui fait beaucoup penser à Ennio Morricone ( franchement ça passerait nickel dans un western spaghetti) avant d'évoluer vers quelque chose de plus bizarre et mélancolique. On comprend de suite qu'on vient d'embarquer là pour un voyage au bout de la nuit. Ou l'érotisme aura une place de choix.

Daughters of Darkness est un film de vampire atmosphérique avant tout. Le fantastique y est à peine suggéré, effleuré du bout de la caméra. Ce qui compte ici c'est le romantisme noir, la poésie et la rêverie. Et pour cela, le cadre du film joue un rôle essentiel. Le Grand Hôtel des Thermes d'Ostende est un décor parfait pour donner cette impression de parenthèse hors du temps qu'a le film. On est hors saison, il n'y a personne dans ce vaste et très bel hôtel à l'architecture du XIXème siècle. Bref, l'ambiance est très particulière.



Harry Kumel réussit ainsi à peaufiner de très beaux plans grâce à ce décor luxueux. Sans entrer dans les outrances baroques du giallo, on sent qu'il s'en inspire pour donner un côté chatoyant aux images qu'il filme. Il insistera aussi sur la plage déserte en face de l'hôtel pour renforcer ce sentiment de solitude et de mélancolie très palpable tout le long du film. C'est magnifique. On est comme dans une bulle. Comme dans un rêve.

Mais n'oublions pas un des atouts majeurs du film : Delphine Seyrig. Une actrice que je ne connaissais absolument pas, alors qu'elle a tout de même tourné avec de grands réalisateurs ( Fred Zinnemann, Alain Resnais, François Truffaut). Elle est absolument parfaite dans le rôle de la comtesse Bathory. Extrêmement belle, avec une voix envoûtante ( dont le timbre fait un peu penser à Jeanne Moreau. Jeanne Moreau, jeune hein!) et des manières et une gestuelle très aristocratiques. Et quelle garde robe ! Non, il n'y a pas à redire ! On tombe sous le charme de Delphine Seyrig ; elle ne joue pas une comtesse vampire, elle est une vampire de la plus haute noblesse!



Il est intéressant de remarquer que Delphine Seyrig a été militante féministe et que le film épouse clairement son combat. Son personnage, Bathory, incarne pleinement la femme forte, puissante et indépendante. Et impitoyable. Sa secrétaire, Ilona ( joué par l'actrice allemande Andrea Rau) a un look très androgyne et fashion, qui la ferait aisément passer pour une mannequin prête à monter sur les passerelles de défilé. Elle aussi est éprise de liberté. Celle qui n'est pas libre c'est Valérie, la jeune mariée ( interprétée par une jolie actrice québecoise, Danielle Ouimet). Ilona désirant ardemment voler de ses propres ailes, sa maîtresse se cherche une nouvelle compagne pour l'Éternité et elle « flashe » littéralement sur la très belle Valérie.

Inutile de dire que le personnage du mari, Stefan ( joué par l'acteur américain John Karlen) est un obstacle. Seul personnage masculin important du film, il incarne parfaitement la figure de l'homme qui opprime la femme. Derrière ses apparences de fils de bonne famille, Stefan cache ( à peine) un esprit attiré par le morbide et la cruauté. Il y a de la bestialité en lui. Autoritaire, violent, possessif mais infidèle, Stefan est une synthèse des défauts masculins pointés du doigt par les femmes. Au bout du compte, c'est une brute qui pense avec ce qu'il a entre les jambes, retirant toute liberté à la femme qui a le malheur de se joindre à lui. Un être tyrannique, menteur et manipulateur, qui n'hésite pas à frapper pour asseoir sa domination et qui est incapable de ressentir le vrai amour. Et dans tout cela, la femme, éternelle victime de l'homme, doit prendre conscience de sa force, s'émanciper et prendre son envol. Telle est la vision du film. Autant dire que la gent masculine se fait tailler un costard ici.



Il faut signaler également qu'au début des années 70 ce mélange de vampirisme, d' érotisme et de lesbianisme est très tendance. La Hammer a sorti The Vampire Lovers en 1970, par exemple. Et en 1974 il y aura le Vampyres de José Ramon Larraz, très axé là dessus ( très ! très!). Bref ce sous genre était indéniablement dans l'air du temps.

En conclusion, Daughters of Darkness est un classique dans le genre. C'est un film fantastique à l'ancienne, classieux, avec des velléités auteurisantes assez évidentes. On en ressort motivé pour découvrir Malpertuis, l'autre film marquant de Harry Kumel, sorti la même année. On peut dire qu'il était en forme en 1971, le Harry !










mercredi 2 octobre 2019

The Car ( 1977) de Elliott Silverstein

Une énorme berline noire terrorise les habitants d'une petite ville du Nouveau-Mexique. Personne n'a vue la tête du conducteur. Est-ce le Diable en personne qui serait au volant ? En tout cas, le shérif Wade Parent ( James Brolin) et son équipe vont devoir faire face à cette horreur. Il faut arrêter cette maudite voiture avant qu'il ne soit trop tard...

Générique. Caméra braquée sur le désert. Dans un style très westernien, un bolide apparaît, comme sorti de nulle part. Ou comme un diable jaillissant de sa boîte. On comprend aussitôt la monstruosité de cette voiture noire, aux vitres teintées. La carrosserie est massive comme une Bête de l' Enfer, et le moteur vrombit en conséquence. Si la caméra adopte parfois le point de vue à l'intérieur de l'habitacle de la voiture, elle se garde bien de nous montrer quoi que ce soit d'un potentiel conducteur. S'il y en a un. D'ailleurs, l'image à ces moments-là devient toute jaune. Comme pour nous dire que ce regard là n'est pas humain.

 
On pense à Duel de Spielberg. À Christine, de Carpenter. Le sujet est très stephenkingien il faut dire : la machine et son côté effrayant et maléfique. Même si ce thème du tas de ferraille démoniaque ne date pas d'hier. En fait, la machine a inspiré ce genre d'inquiétude à l'homme depuis le début.

The Car fait aussi énormément penser à un autre film culte, Jaws. Car la voiture vient semer la terreur en ville de la même manière que le requin ( un bisou à toi, Bruce) devient le cauchemar d' Amity. Le désert remplace l'océan, voilà tout. Et il apporte avec lui son aura de mystère.

 
Mais parlons un peu des personnages maintenant. Tout d'abord le shérif Wade. Incarné par le charismatique James Brolin (oui, le papa de Josh) . Pas le plus célèbre des acteurs mais il aura joué dans de sacrés films comme Mondwest, de Michael Crichton ( 1973), Capricorn One, de Peter Hyams ou The Amityville Horror en 1979. Bref, il a eu sa phase de succès, le Brolin père. Et on peut dire qu'il est très bien dans The Car. Lorsqu'on le voit en train de conduire ses deux filles - qu'il appelle les « gars » - en moto et sans casque, on se dit «  voilà un mec cool ! ». Cette simple petite scène nous montre toute l'insouciance du personnage et la tranquillité de cette petite ville. Et c'est diablement malin de nous la faire percevoir ainsi car on sait que le danger est là.

Notons que les victimes de la voiture ont toutes droit à une scène qui nous les rend attachantes. Par de l'humour et de la fraîcheur, on donne à ces personnages un peu de vie ; ils ne sont pas que de la chair à bodycount. Parmi les autres personnages signalons celui d'Everett ( John Marley) le vieux shérif qui fait figure de patriarche de famille dans cette petite communauté où tout le monde se connait. Il y a aussi la charmante Loren ( Kathleen Lloyd, actrice qui a surtout tourné dans des séries TV, Magnum par exemple) et Luke ( joué par Ronnie Cox, oui, le big salopard de l' OCP dans Robocop, Cohaagen dans Total Recall, bref un acteur plutôt à l'aise dans les rôles de bad guy) un policier alcoolique qui illustre bien toute la souffrance, toute la vulnérabilité de ces hommes ( certes des représentants de la loi mais pas tous des héros) face à ce terrible danger.

  
Un petit mot sur la musique composée par Leonard Rosenman. Une très belle partition extrêmement angoissante et donc parfaitement adaptée au film. The Car lui doit beaucoup.Que dire d'autre ? Que c'est un film indéniablement très marqué par son époque et les influences d'alors. Les années 70 ont été riches en diableries ( The Omen en 76, L'Exorciste en 73, Amityville en 79 etc...) et The Car semble surfer sur la vague. Mélangeant horreur, certains éléments du western ( les grands espaces du désert, la présence indienne) et du road-movie cher à l'Amérique, The Car, bien qu'un peu oublié, vaut le coup d'oeil.

mardi 19 février 2019

Capitaine Kronos : tueur de vampires ( 1974) de Brian Clemens

En 1974 la Hammer avait besoin de sang neuf. Toujours accrochée aux recettes gothiques qui firent sa gloire dans les années 60, la célèbre firme anglaise a dû mal à se renouveler. De l'autre côté de l'Atlantique des films d'horreur novateurs fleurissent, tels La nuit des Morts Vivants ( 1969) ou l'Exorciste ( 1973). Pour essayer de faire peau neuve, la Hammer tentera donc de lancer une nouvelle saga dont le Capitaine Kronos : tueur de vampires qui nous intéresse aujourd'hui en est le premier épisode. Et le dernier, hélas. Car, disons-le franchement, le film a fait un bide commercial. Le président de la Hammer, Michael Carreras lui-même, n'a semble-t-il pas du tout apprécié le film et a retardé la sortie en salle le plus possible. Et four, il y eut. Et pourtant, et pourtant...

Mais au fait, de quoi ça parle ? Allez, pitch : Nous sommes à la fin du XIXème siècle. Officier de la Garde Impériale, le capitaine Kronos ( Horst Janson) arrive dans un village où il a été appelé par son vieil ami, le Docteur Marcus ( John Carson) , suite aux décès suspects de plusieurs jeunes femmes, retrouvées le visage affreusement vieilli. Aidé d'une jeune moribonde mise au pilori ( Caroline Munro) ainsi que de son assistant bossu Grost ( John Cater), Kronos réalise immédiatement qu'il a affaire à un cas de vampirisme...

"Tiens, dans ta gueule !"
Ce que l'on peut dire c'est que l'insuccès du film n'est pas dû à son manque d'idées. Aller chercher Brian Clemens, scénariste et producteur de Chapeau Melon et Bottes de Cuir, c'était très bien vu déjà. On peut dire que Clemens, dont c'était alors la première expérience derrière la caméra ( et la dernière aussi ! Et c'est bien dommage!) a apporté un véritable vent de fraîcheur au film.

Car oui, Capitaine Kronos : tueur de vampires innove pas mal, et de manière intelligente, par rapport à la production Hammer standard. Ici, par exemple, les vampires ne sont pas forcément des suceurs de sang. Ils peuvent également se nourrir de la jeunesse de leurs victimes. L'idée qu'il existe plusieurs espèces de vampires, avec des régimes alimentaires et des points faibles divers, est intéressante. Tous ne se laissent pas forcément tuer par un pieu dans le cœur. Le tueur de vampires doit donc à chaque fois trouver l'arme idéale au cas par cas. Il ne suffit plus d'agiter bêtement un crucifix à la face du vampire. Si on n'a pas la foi en Dieu, l'objet se révèle inefficace.

"Capitaine Kronos, sauvagement torturé "  
En terme de mise en scène, là aussi les idées visuelles pullulent ( Une cloche qui se met mystérieusement à saigner pour signaler que la malédiction s'abat sur le village. La croix dans l'église dont les branches se tordent. Les fleurs qui meurent instantanément sous les pas du vampire etc...etc...). Signalons également le bon choix de montrer le vampire avec sobriété et avec des apparences spectrales. Bref, si les couleurs flamboyantes de la grande époque ne sont plus de rigueur, le film garde néanmoins un côté baroque et a sacrément de la gueule. Il bénéficiera également d'une belle qualité d'écriture au niveau des dialogues qui permettront l'ajout de petites touches d'humour pleines d'esprit et fort bien placées. À cela s'ajoute une bo, ma foi, fort sympathique et efficace à nous immerger dans l'histoire.

Capitaine Kronos fera également partie de ses productions Hammer où l'érotisme sera davantage mis en avant. On peut dire que les jolies filles ne manquent pas à l'appel, avec la starlette Caroline Munro en tête de file. Vous voyez que ce film a ses arguments ! Oh oui, bien sûr, Horst Janson – acteur allemand qui pour moi était jusqu'alors un illustre inconnu – campe ici un tueur de vampires qui relève du prince vendeur de biscuits chocolatés... C'est vrai qu'il est un peu fadasse et qu'on ne peut le comparer aux légendes de la Hammer ( Lee, Cushing, Reed). Mais sa performance n'est pas non plus catastrophique. En contrepartie, le personnage du bossu Grost– figure pour une fois montrée autrement que comme un vil freak serviteur du Mal – se révèle être pétillant et attachant. C'est d'ailleurs de lui que proviennent les fameuses touches d'humour du film. L'acteur qui l'interprète, John Cater, est clairement un théâtreux.

 
On aura reproché au film de trop mélanger les genres : horreur, films de cape et d'épée, et western en l'occurence. Oui, oui, western ! Il faut avoir vu le Capitaine Kronos et Grost se faire provoquer dans un bar par trois brigands. Voilà que le capitaine dégaine son épée plus vite que son ombre. Une vraie scène de saloon.... Pour en revenir aux défauts du film il est indéniable que le scénario parfois patine un peu dans la semoule. Ces reproches sont valables, il est vrai. Et pourtant le film se tient parfaitement jusqu'au bout. On arrive au dernier acte les yeux toujours scotchés à l'écran. Et quel final ! Certains diront que c'était cousu de fil blanc. Dans mon cas précis, que nenni ! De la révélation, du drame, du combat à l'épée, tout ça montré par une caméra audacieuse et agile : que demande le peuple ?

Oui, malgré sa mauvaise réputation et ses faiblesses, Capitaine Kronos : tueur de vampires est un bel objet filmique plein d'atouts. S'il est indéniablement associé à la période de déclin de la Hammer, le film mérite d'être réévalué, je trouve. J'ai même ouïe dire qu'il est l'objet d'un petit culte chez les fans hardcore de la Hammer. Et bien, j'en suis alors !

Bad Moon ( 1996) de Eric Red

Alors qu'il sont en pleine expédition au Népal, Ted Harrison et sa petite amie Marjorie, vont être sauvagement attaqués par un ...